Critique de l’Intelligence Artificielle

Enjeux philosophiques et politiques de l’automatisation numérique

Programme du colloque : https://llcp.univ-paris8.fr/colloque-international-critique-de-l-intelligence-artificielle-enjeux
Organisation : Anne Alombert, Baptiste Loreaux, Alban Leveau-Vallier
Contacts : anne.alombert@univ-paris8.fr  ; batloreaux@gmail.com  ; albanlv@gmail.com.
Dates : 27-28 mai 2024
Lieu : Université Paris 8, MR 002.
COLLOQUE INTERNATIONAL
Critique de l’Intelligence Artificielle :
enjeux philosophiques, politiques et culturels de l’automatisation numérique
27-28 mai 2024
Maison de la Recherche, Amphi MR002
Université Paris 8
2, rue de la Liberté – 93200 Saint-Denis (M° Saint-Denis Université)
Laboratoire d’études et de recherches sur les Logiques Contemporaines de la Philosophie (LLCP)
Networking Ecologically Smart Territories (NEST)
Organisation : Anne Alombert, Alban Leveau-Vallier, Baptiste Loreaux
Le développement fulgurant des « intelligences artificielles génératives », qui tendent aujourd’hui à intégrer massivement l’écosystème numérique (moteurs de recherche, suite bureautique, code informatique, etc.) prépare une bifurcation technologique majeure, qui pourrait conduire, à terme, à l’automatisation des facultés d’expression et de pensée. Contrairement à ce que le vocable d’ « intelligence artificielle » pourrait laisser croire, les technologies numériques contemporaines n’apprennent pas et n’inventent pas : elles constituent des dispositifs de calculs, qui, grâce, à l’indexation (humaine) de quantités massives de données et au moyen de certaines opérations mathématiques très spécifiques, permettent de « générer » des contenus (textuels ou imagés) comparables aux contenus dits « humains » (sur l’exploitation statistique desquels ces systèmes sont fondés). S’il faut critiquer la notion d’« intelligence artificielle », c’est donc d’abord pour déconstruire les analogies entre esprits, cerveaux et ordinateurs (qui reposent sur les dualismes métaphysiques les plus classiques), afin d’ouvrir une réflexion à la fois épistémologique, anthropologique et politique au sujet de ce que nous proposerons ici de décrire comme des automates computationnels ou numériques.
Une telle critique n’a pas pour but de dénoncer ou de condamner tel ou tel dispositif, mais bien de s’interroger sur les limites (théoriques comme pratiques) des technosciences numériques : durant ce colloque, nous proposons de déployer la critique selon plusieurs perspectives complémentaires.
1/ Enjeux historiques et politiques
Nous nous interrogerons tout d’abord sur la genèse des technologies actuelles, qui tirent leurs origines des recherches cybernétiques amorcées dès les années 40-50, en particulier dans les laboratoires de recherche américains, contemporainement à l’engagement des Etats-Unis dans le second conflit mondial. Dans quelle mesure cet ancrage historique configure-t-il cette mutation technologique ? En quoi les impératifs de la Guerre Froide et du management néo-libéral ont-ils donné de nouvelles tournures à cette mutation ? Comment les évolutions technologiques actuelles, en particulier lesdites « intelligences artificielles génératives » fondée sur les large langage models, s’intègrent-elles aux logiques techno-économiques contemporaines, fondées sur l’économie comportementale, la « gouvernementalité algorithmique » et le « capitalisme linguistique » ? Le mythe de la « singularité technologique » masquerait-il l’automatisation de la décision et l’élimination de la politique ?
2/ Enjeux épistémologiques et philosophiques
Nous tenterons aussi de déconstruire les discours idéologiques concernant les technologies numériques, en nous appuyant sur les ressources de la philosophie. Quels sont les paradigmes théoriques sous-jacents aux sciences cognitives, à la cybernétique et au champ de ce qui a été nommé, en 1956, l’ « intelligence artificielle » ? Comment les philosophes contemporains ont-il inquiéter ces présupposés ? Si un nombre croissant d’entités semblent échapper aux catégories stabilisées dans les oppositions conceptuelles traditionnelles de sujet et d’objet, de nature et de culture, de vivant et de machine, etc., comment éviter le double écueil d’une mécanisation de l’esprit, largement véhiculée par l’idéologie cognitivo-computationnaliste et de l’anthropomorphisation des dispositifs algorithmiques, largement véhiculée par l’idéologie transhumaniste ?
3/ Enjeux culturels, artistiques, linguistiques, esthétiques
Enfin, nous nous demanderons comment ces nouveaux dispositifs prothétiques affectent les facultés de créativité, d’expression et de pensée : les pratiques artistiques peuvent-elles nous aider à subvertir les idéologies réductionnistes qui se concrétisent à travers les dispositifs technologiques dominants ? A quels nouveaux types de textes, d’images et de symboles serons-nous confrontés dans les années à venir ? Est-il possible d’éviter les effets d’uniformisation et de standardisation provoqués par les calculs statistiques et d’envisager une réappropriation culturelle des automates numériques ? Comment transformer les « intelligences artificielles » pour en faire des « instruments spirituels » ?
 
PROGRAMME
27 mai 2024
9h-12h30
Enjeux épistémologiques et philosophiques de la cybernétique et de l’« intelligence artificielle »
Intervenant(e)s : David Bates, Baptist Loreaux, Giuseppe Longo et Jean Lassègue
La prédiction n’est pas l’anticipation : apprentissage automatique et cognition humaine.
Davis Bates (Professor, University of california, Berkely, Philosophy)
Qu’est-ce qu’une “ashbysation” ? Enquête sur la matrice cybernétique des réseaux de neurones.
Baptiste Loreaux (Doctorant, Université Paris 8, Philosophie)
La double malédiction des dimensions.
Giuseppe Longo (Directeur de Recherche, CNRS-ENS, Mathématiques et Epistémologie)
La double malédiction des Luddites.
Jean Lassègue (Directeur de Recherche, CNRS-EHESS, Histoire de l’Informatique)
27 mai
14h-17h30
Enjeux philosophiques et politiques de la cybernétique et de l’« intelligence artificielle »
Intervenant(e)s : Anne Alombert, Pablo Jensen, Lê Nguyen Hoang, Félix Tréguer.
Panser la « bêtise artificielle » : logocentrisme informatique et déraison computationnelle.
Anne Alombert (Maîtresse de Conférences, Université Paris 8, Philosophie)
Deep Earnings : l’étrange lien entre intelligence artificielle et néolibéralisme
Pablo Jensen (Directeur de Recherche, CNRS-ENS, Physique)
Le paradigme de l’Intelligence Artificielle, une accélération de la domination bureaucratique et capitaliste.
Félix Tréguer (Chercheur associé au Centre Internet et Société, CNRS, et membre de la Quadrature du Net, Théorie Politique)
Trois questions philosophiques sur la démocratie numérique.
Lê Nguyen Hoang (Docteur en Mathématiques, PDG de Calicapra et Président de Tournesol)
28 mai 2024
9h-12h30
La langue, l’écriture et la culture à l’épreuve de l’« intelligence artificielle générative »
Intervenant(e)s : Frédéric Kaplan, Michal Krzykawski, Juan-Luis Gastaldi, Alban Leveau-Vallier.
Que comprend-on de ce que “comprend” ChatGPT ?
Alban Leveau-Vallier (Docteur, Université Paris 8, Philosophie)
Critique de la raison linguistique : de quoi les modèles neuronaux de langage sont-ils le modèle ?
Juan Luis Gastaldi (Chercheur, ETH Zurich, Histoire et Philosophie des sciences)
Le métabolisme informationnel et les grands modèles de langage : vivons-nous une nouvelle rupture métabolique ?
Michal Krzykawski (Professeur, Université de Silésie à Katowice, Philosophie)
L’herméneutique digitale et l’idiome.
Noel Fitzpatrick (Professor, Technological University Dublin, Philosophy and Aesthetics)
Proxies : démons statistiques métastables invocables à partir de modèles de langage.
Frédéric Kaplan (Professeur, École polytechnique fédérale de Lausanne, Humanités Digitales)
28 mai
14h-17h30
Les pratiques de l’art et du design à l’épreuve de l’« intelligence artificielle générative »
Intervenant(e)s : Pierre Cassou-Noguès et Gwenola Wagon, Yves Citton et Grégory Chatonsky, Mathieu Garling, Anna Longo, Antonio Somaini.
Pour une théorie des espaces latents
Antonio Somaini (Professeur des Université, Université Sorbonne Nouvelle, Théorie des médias)
Si l’IA est une arme dans la guerre pour la subjectivation, dans quel combat l’art s’engage-t-il ?
Anna Longo (Directrice de Programme, Collège International de Philosophie, Philosophie)
Copilotes anciens et nouveaux. Des exercices cybernétiques du soi non-moderne à l’IA générative dans la création contemporaine.
Mathieu Garling (Doctorant, ENS, Esthétique et théorie des arts)
Rétentions quaternaires et quatrième mémoire.
Grégory Chatonsky (Artiste et Chercheur, ENS et ARTEC)
Yves Citton (Professeur des Universités, Université Paris 8, Littérature)
Anarchives du feu.
Gwenola Wagon (Professeur des Universités, Université Paris 1, Arts Plastiques)
Pierre Cassou-Noguès (Professeur des Universités, Université Paris 8, Philosophie)
 

PROGRAMME DU SEMINAIRE

Ce colloque s’inscrit dans la continuité d’un séminaire de recherche organisé à l’Université Paris 8, dans le cadre du LLCP.

5 FEVRIER Cybernétique et politique dans les travaux de Norbert Wiener
Séance dirigée par Pierre Cassou-Noguès
13 FEVRIER à 15hProméthée numérique, entre rêves et cauchemars
Séance dirigée par Anne Alombert, Andrea Angelini et Giuseppe Longo
19 FEVRIER –  Automates, cerveaux et ordinateurs : une critique interne des idéologies computationalistes et
cognitivistes à partir des travaux de John von Neumann
Séance dirigée par Baptiste Loreaux
11 MARS Hypernudge : cybernétique et management
Séance dirigée par Eugène Favier-Baron et Simon Woillet
25 MARSLe rôle de la cybernétique dans la pensée de Félix Guattari
Séance dirigée par Quentin Dubois
8 AVRIL La controverse autour des facultés de raisonnement des grands modèles de langages
Séance dirigée par Alban Leveau-Vallier
9 AVRIL à 16h – Discussion autour des travaux de Geert Lovink
Séance dirigée par Geert Lovink
6 MAI – Machine learning et enactivisme selon Francesco Varela
Séance dirigée par Vincent Bagayoko
13 MAI – Panser l’exosomatisation cybernétique et la bêtise artificielle avec Bernard Stiegler
Séance dirigée par Anne Alombert
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages
Articles